La Gazette - N° 18 - 2018- 4e trim
Le billet du trimestre
À propos de la « Grande Collecte » ...
La France commémore le centième anniversaire de la signature de l'armistice qui mit fin à la Grande Guerre. Les historiens n'ont pas fini de débattre sur les responsabilités des uns et des autres. Clémenceau sut gagner la guerre, mais sut-il négocier la paix ? Ce qui en revanche ne fait aucun doute, c'est le bilan humain de ces cinq années de conflit : près de 19 millions de morts, militaires et civils à parts à peu près égales, dont 1,7 million pour la France (1,4 de militaires et 0,3 de civils). Cette macabre statistique n'inclut ni les blessés, les « gueules cassées », les amputés, ni les veuves ou les orphelins.
À lui seul notre arrondissement a payé un lourd tribut. Il suffit pour s'en convaincre de regarder la grande plaque de marbre apposée au mur de notre mairie (porte A à gauche dans la cour), avec ses centaines de noms. De son côté notre société a publié dans ses n° XVIII et XIX (années 1916 et 1917) la liste des militaires domiciliés dans l'arrondissement titulaires d'une décoration ou d'une citation, et nombre de nos adhérents de l'époque ont eu à pleurer la perte d'un fils ou d'un neveu, quand ce n'est pas plusieurs.
Les Archives nationales, la Bibliothèque nationale de France et toutes les Archives de France renouvellent cette année auprès du public leur appel au don ou au dépôt d'archives personnelles ayant trait à la Grande Guerre, sous l'appellation de « Grande Collecte ». L'objectif est de recueillir le maximum de documents de toute nature témoignant de ce qui a constitué le quotidien des Français, militaires et civils, pendant cette période hors normes, et d'éviter autant que possible la destruction de pièces pouvant présenter un réel intérêt pour la connaissance de cette période.
Dans le même esprit, nous pensons que beaucoup d'entre vous détiennent, peut-être sans en avoir conscience, des documents qu'ils croient de bonne foi dépourvus du moindre intérêt, mais qui, en réalité, méritent d'être conservés et exploités. Il peut s'agir de manuscrits racontant le vécu d'un aïeul habitant du 6e pendant le siège de 1870-1871, la Commune, la Grande Guerre, l'Occupation, la Libération, ou même plus près de nous les journées de mai 68. Cela peut être aussi des journaux ou des magazines, des imprimés administratifs, des photographies, des images, etc. Nous vous proposons de nous les montrer pour que nous en évaluions avec vous l'intérêt et, avec votre accord bien entendu, nous pourrions les numériser et les présenter sur notre site internet. À titre d'exemple, Monsieur le maire du 6e a bien voulu nous remettre quelques documents qui viennent très opportunément compléter notre documentation. De même un nos fidèles sociétaires a pris récemment l'excellente initiative de nous apporter une série de plaquettes rédigées de sa main sur un certain nombre d'édifices de l'arrondissement. Qu'ils en soient ici tous deux chaleureusement remerciés. Le cas échéant nous pouvons aussi envisager la publication, sous forme d'un bulletin hors-série, des écrits constituant un apport significatif à la connaissance d'un événement, d'un édifice ou d'un personnage ayant un lien reconnu avec le 6e arrondissement.
N'hésitez donc pas à nous contacter, nous nous ferons un plaisir d'accueillir vos propositions et d'étudier avec vous les suites qui pourront leur être données. Cette société est notre bien collectif, et c'est tous ensemble que nous réussirons le mieux à la maintenir fidèle à son objet social : promouvoir l'histoire et le patrimoine de notre arrondissement.
Notre société il y a cent ans
Le mardi 17 décembre 1918 se tenait l'assemblée générale annuelle de notre société, sous la présidence de Louis-Gabriel-François Simon-Juquin, maire du VIe arrondissement. Comme l'année précédente, « à cause de la guerre à peine terminée et des deuils qu'elle a entraînés », la réunion eut lieu dans « le local habituel de nos séances », dont ne pouvons malheureusement pas préciser l'emplacement exact, et « non dans l'une des brillantes salles des fêtes ». Le président adressa « un dernier souvenir à nos morts et en particulier à ceux d'entre eux qui voulurent bien s'intéresser effectivement aux travaux de la société ». Les points habituels de l'ordre du jour ayant été épuisés, une interruption de séance permit ensuite au conseil d'administration d'élire son nouveau président. Le poste était en effet resté vacant depuis le décès, un an auparavant, de Félix Herbet, dont, pour honorer la mémoire, l'assemblée de l'année précédente avait décidé de différer la succession. C'est le président de séance, Louis-Gabriel-François Simon-Juquin, inaugurant ainsi la tradition qui fit que, pendant les décennies suivantes, le maire du VIe arrondissement assura aussi les fonctions de président de notre association.
Notre arrondissement, il y a ….
… trois cent cinquante ans …. Le 18 octobre 1668, naissait dans l'hôtel familial construit par son grand-père le Grand Condé Louis III de Bourbon-Condé. On le maria avec l'une des filles légitimées de Louis XIV et de Madame de Montespan, Mademoiselle de Nantes, qui lui donna neuf enfants. De santé fragile, il mourut à l'âge de 41 ans. Rappelons que, si l'hôtel de Condé a été démoli dès avant la Révolution, son souvenir est entretenu par les noms donnés aux voies tracées dur le terrain qu'il occupait, la rue Monsieur-le-Prince et la rue de Condé.
… cent ans …. Le 9 novembre 2018 mourait de la grippe espagnole à son domicile boulevard Saint-Germain Gugliemo Alberto Wladimiro Alessandro Apollinare de Kostrowitsky, sujet polonais de l'Empire russe, né à Rome et naturalisé français en 1916, universellement connu sous son patronyme francisé : Guillaume Apollinaire. Engagé dans l'armée française en décembre 1914, il est gravement blessé à la tempe en mars 1916, ce qui met fin à sa participation à la guerre. Notre arrondissement vient de lui rendre un double hommage : les 8 et 9 novembre derniers, par la Société des poètes français, au cours de deux soirées organisées à l'espace culturel Mompezat rue Monsieur-le-Prince, et le 13 novembre, par la mairie du 6e arrondissement, qui a accueilli dans ses locaux une journée composée de « 8 conférences sur la vie et l’œuvre du poète pendant la guerre, son expérience de soldat, ses amours et sa vision de Paris avant et pendant le conflit ».
… cent ans également …. Le 2 décembre 1918 mourait à Paris l'inoubliable auteur de Cyrano de Bergerac, Edmond Rostand, victime, comme Apollinaire et tant d'autres, de la grippe espagnole. Il était né à Marseille cinquante ans plus tôt, le 18 avril 1868, ce qui fait de cette année 2018 à la fois le cent cinquantième anniversaire de sa naissance et le centième anniversaire de sa mort. Le 2 décembre 1924, on baptisa place Edmond-Rostand le tout début de la rue de Médicis, au carrefour avec le boulevard Saint-Michel et la rue Soufflot. Elle est agrémentée d'une jolie fontaine sculptée en 1862 par une autre gloire de l'arrondissement, Gustave Crauk, dont chacun connaît le célèbre Centaure qui orne la cour de notre mairie.