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Petit journal du confinement - No 17

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17 01 2021

Au fil du confinement

Que retiendrai-je du confinement, cette période si étrange, qui nous a tous vus nous replier chez nous pour nous protéger d’une contagion fulgurante ?

Entre le 16 mars et début juin, les pages de mon agenda sont presque toutes blanches… Ici et là, des mentions comme « élections municipales » (le 22 mars), ou « déjeuner avec… », événements qui ne sont jamais advenus, et pour cause. Pour un peu, il me semble que ce printemps 2020 n’a pas eu lieu… mais il en va autrement pour nos proches ou relations qui ont été affectés ou ont vécu un impossible deuil.

Le jeudi 12 mars, nous rentrons d’un vernissage ; sur le chemin, je remarque des personnes arrêtées, suspendues à leur téléphone : elles écoutent l’allocution du président de la République, l’air grave. Un peu plus tôt dans la journée, la décision a été prise de maintenir les élections fixées au dimanche suivant, et le directeur du centre de recherche dans lequel je travaille m’a annoncé une fermeture imminente. J’hésite à prendre quelques livres qui pourront m’être utiles pour travailler de chez moi mais renonce, ne voulant pas me charger… Nous partons malgré tout en week end chez des amis grenoblois ; le printemps s’annonce et nous faisons une belle promenade. Mais en ville, nous croisons une patrouille de militaires, ce qui me rappelle les tristes événements de l’année 2015. Que se passe-t-il ? Le dimanche, à la suite des annonces du Premier ministre, la situation change brutalement, et notre seule sortie est pour prendre le train du retour.

Lundi 16 mars, je renonce à passer à mon bureau, même pour un aller-retour : les conditions d’accès sont devenues draconiennes… Après tout, cela n’a rien d’indispensable, et j’ai l’impression que le virus est tapi à chaque coin de rue…

Est-ce que les mesures de confinement, décrétées pour l’ensemble du pays, et pour une durée reconductible, s’apparentent à un état de guerre ? Mes parents ont vécu l’exode, les bombardements, les privations de l’occupation alors je n’y crois pas, ce ne peut pas être aussi terrible. Ma famille est en sécurité, nous vivons dans des conditions privilégiées et pourtant… Le ton est martial, les nouvelles des hôpitaux alarmantes. Dès le mardi 17 mars, la vie ralentit tout autour de nous ; plus de circulation, ou des ambulances, un silence que je trouve tantôt agréable, tantôt pesant, selon l’humeur. Nous traversons le boulevard Raspail sans nous soucier des voitures, comme au mois d’août…

Puisque la situation risque de durer, il faut s’organiser. J’ai la chance de pouvoir travailler de chez moi commodément, et le fais régulièrement, mais là, ma journée hebdomadaire de télétravail dure toute la semaine… Quand nous nous hasardons dehors, on voit très peu de monde dans les rues, et on se croise presque avec méfiance… Le 24 mars, je découvre qu’il n’y a plus de marché ; j’espérais un sursis mais la décision a été appliquée immédiatement.

Je prends des nouvelles de la famille, de nos amis, de mes collègues, dont quelques-uns vivent seuls… Avec quelques amies mères de famille, nous nous félicitons de ne plus avoir d’enfants d’âge scolaire. Mon mari me raconte les séances de travail avec ses collègues où enfants et chat s’invitent dans la réunion.

Début avril, mon professeur d’italien réussit à reprendre son cours, grâce à l’application Zoom. Après quelques tâtonnements, notre petit groupe se retrouve ponctuellement pour discussions et exercices de grammaire. Une vraie récréation pour moi, même si certaines semaines, je nous trouve un peu éteints, malgré l’enthousiasme de notre professeur…

Le 12 avril, nous fêtons Pâques, mais bizarrement, il nous semble que le carême n’en finit pas. Et le pape a l’air bien seul dans l’immense basilique Saint-Pierre.

J’ai l’impression que le temps n’a jamais été aussi beau que depuis que nous sommes contraints à rester enfermés. Je suis tout étonnée de voir que les arbres ont leurs feuilles ; nos iris fleurissent, somptueux, avant le muguet, les pois de senteur, le jasmin. Les oiseaux s’en donnent à cœur joie.

 

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Je cesse de compter le nombre de jours, de semaines. Le travail ne manque pas, les semaines passent finalement assez vite. Je corrige des articles pour une revue, relis des épreuves, vérifie des traductions, l’édition de lettres. Cela me vaut des discussions avec mes collègues, par Skype ou par mail, échanges qui prennent une tournure plus personnelle par SMS : suggestions de films et spectacles (merci la Comédie-Française !), de lectures, exploits culinaires…

L’annonce du « déconfinement » est à la fois attendue et redoutée. Un ami me dit que nous sommes un peu comme des animaux qui n’osent plus sortir de leur cage, même ouverte. Pas question pour autant de retourner à mon bureau, on nous en dissuade. Je m’y risque dès que c’est autorisé parce que j’ai absolument besoin d’un document dans mon ordinateur ; les couloirs sont vides et silencieux, j’ai presque l’impression d’être là de façon clandestine. Je rencontre quatre collègues (sur une bonne vingtaine), nous sommes heureux de nous voir, de loin !

Catherine Gros

Le 4 juin 2020

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